Julie Lallouët-Geffroy était l’invitée de Gaël Le Du, dans l’émission Champ contre-champ, sur Radio Bro Gwened (RBG), le 27 septembre 2022. Notre journaliste y a présenté l’enquête sur la méthanisation agricole en Bretagne qu’elle a co-signée pour « Splann ! » avec Raphaël Baldos.
« Nous avons été interpellés par l’apparition de nombreux dômes dans les campagnes bretonnes, se souvient Julie Lallouët-Geffroy. La presse locale faisait état de contestations chez les riverains. Dans le même temps, on nous présente la méthanisation comme de l’économie circulaire, où l’on valorise les déchets en faisant de l’énergie. Nous avons voulu savoir ce qu’il y avait derrière la carte postale. »
« Pour nous la question n’est pas du tout de savoir si la méthanisation c’est bien ou mal, ce n’est pas notre sujet. Nous avons voulu comprendre dans quelles conditions cette technologie se développe, avec quelles conséquences pour le territoire breton. »
Pour autant, l’enquête ne fait pas l’impasse sur les accidents et incidents liés à la méthanisation. Des plus petits aux plus gros, comme le déversement de 400 m³ de digestat, en août 2020, dans l’Aulne, au niveau de Châteaulin (29), pour lequel l’entreprise Engie a été condamnée à 150 000 € d’amende trois ans plus tard.
« Il y a un phénomène général, documenté par les services de l’État, constate l’enquêtrice. La réglementation n’est pas appliquée parce qu’il y a un régime dérogatoire très largement utilisé en Bretagne et que les contrôles sont très faibles. Des mesures sont mises en œuvre, comme des labels ou des formations, mais nous n’avons pas trouvé de documents qui prouvent leur efficacité. »
L’un des volets de l’enquête porte sur l’arrivée de nouveaux acteurs dans le marché de la méthanisation : les industriels de l’énergie. Ceux-ci s’accaparent les bénéfices de la production du gaz.
« Les montants d’investissements sont beaucoup plus importants en injection qu’en cogénération, qui était la technologie initiale, explique la journaliste. Des agriculteurs peuvent s’allier pour faire des unités plus importantes, mais il voient arriver les industriels de l’énergie gagner du terrain. Ils deviennent de plus en plus des fournisseurs de matières premières, un peu comme des sous-traitants, qui ne récupéreront pas la valeur ajoutée. »
Un autre point critique concerne l’usage des terres agricoles. Par exemple, le maïs sert à nourrir les bêtes, mais permet aussi d’alimenter les méthaniseurs. Une concurrence peut s’instaurer pour l’accès à cette ressource, surtout si la production d’énergie rapporte plus. « Des terres sont en train d’être dédiées à la méthanisation. Jusqu’où veut-on aller ? Nous voulons porter le débat dans l’espace public », expose Julie Lallouët-Geffroy.
Le dossier aborde enfin une problématique peu étudiée, celle de la potentielle dissémination d’agents pathogènes par les digestats épandus sur les terres. « Le temps de la science n’est pas le temps du développement de la méthanisation. Que se passe-t-il lorsqu’on mélange des déchets venant de plusieurs exploitations, des abattoirs, des cidreries, des laiteries, etc. On ne sait pas. »
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