Citation expliquée: « Les insectes piquent, non par méchanceté… », Nietzsche, 1879.

Citations célèbres expliquées

03-12-2022 • 4 minutes

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Citations célèbres expliquées: « Les insectes piquent, non par méchanceté, mais parce que, eux aussi, veulent vivre : il en est de même des critiques ; ils veulent notre sang et non pas notre douleur. », Opinions et sentences mêlées, Nietzsche, 1879.


Cette citation a la forme d’un aphorisme. Nietzsche pensait que cette forme de pensée était à même de mener à la réflexion plus que de grands traités et obligeait le lecteur à établir lui-même les liens entre les différentes idées posées en sentences par l’auteur, à découvrir lui-même le fil de la réflexion, le modèle. Cette citation s’inscrit dans cette trame. Tirée de la deuxième partie de son ouvrage Humain, trop humain, elle constitue un des 408 aphorismes, un des 408 courts énoncés qui délivrent une pensée de ce chapitre Opinions et sentences mêlées.

Cette citation prend pour sujet la critique, plutôt les critiques. Elle compare de manière péjorative les critiques à des insectes. À l’évidence, Nietzsche les prend pour des parasites. Les critiques ne créent rien, sont juste dans le commentaire de la création d’autrui. Ils vivent donc sur et par le travail d’autrui. Cette animalisation dépréciative rend compte de la difficulté de Nietzsche à être reconnu de son vivant.

Il ne perd cependant pas de vue sa pensée profonde, celle de la nécessité matérielle et/ou spirituelle de l’être, du besoin avant tout: veulent vivre. Les critiques se comportent comme des parasites pour leur survie, non par un destin préétabli ou une volonté exercée. C’est encore une fois les rabaisser.

La première partie de la citation semble naturaliste, décrire le processus de vie d’un moustique. Seulement, la seconde partie nous indique bien quelle est la cible du philosophe: il en est de même des critiques. La comparaison est posée. Le lecteur perçoit bien le jugement de l’auteur.

Dans la fin de la citation, il fait preuve de recul: ils veulent notre sang et non pas notre douleur. Ainsi, il continue la comparaison parasitaire des critiques, qui bouffent l’essence du créateur, son sang, ce qu’il a donné avec sa sueur, ses tripes, son coeur, son esprit. Cependant, ils ne pensent pas assez loin pour voir qu’ils font souffrir. Quand le philosophe allemand écrit qu’ils ne veulent pas notre douleur, il exprime le fait que les critiques font mal, mais que leurs auteurs ne s’en rendent pas compte, obsédés par le fait de sucer la création. L’attaque n’est pas personnelle. Elle est un tremplin pour le critique qui ne voit pas l’être humain derrière l’oeuvre. Le critique apparaît donc sans émotion, sans compassion, sans originalité. Il est une machine, un insecte.

Nietzsche partagé avec Baudelaire, notamment dans son poème Un mot, un poème: la critique, « Le chien et le flacon », Baudelaire. un jugement dépréciatif des critiques. Si les critiques sont effectivement des parasites, il n’en demeure pas moins qu’ils participent à la publicité, à la reconnaissance même éphémère d’une œuvre.

Les insectes piquent, non par méchanceté, mais parce que, eux aussi, veulent vivre : il en est de même des critiques ; ils veulent notre sang et non pas notre douleur.

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